Édition scientifique à l'ère de l'Open Access

La nouvelle initiative du Plan S secoue le monde de l’édition

Dans un article publié sur Nature, Holly Else, journaliste scientifique, met en lumière les tensions entre financeurs et éditeurs par rapport à la mise en place du plan S, officiellement effectif depuis le 1er janvier 2021. En effet, pour accélérer l’accès ouvert aux publications, les financeurs de la cOAlition S souhaitent mettre fin au modèle d’abonnement aux revues ce qui a suscité de vives inquiétudes de la part d’éditeurs importants.

Les questions économiques sont depuis toujours la principale pomme de discorde. De nombreux bailleurs de fonds et chercheurs soulignent que les grandes sociétés d’édition scientifique réalisent des bénéfices considérables en comptant sur les chercheurs pour fournir gratuitement des manuscrits et réviser leurs travaux respectifs. En retour, les éditeurs affirment que leur travail ajoute de la valeur aux articles scientifiques.

D’après les éditeurs, le passage à l’Open Access (OA) pose notamment problème pour les revues très sélectives qui rejettent la plupart des articles qui leur sont soumis. Ces revues ont fait valoir que, si elles passaient à un modèle OA, elles devraient facturer des frais extrêmement élevés pour la publication de leurs articles. Ces revues se sont finalement adaptées pour devenir “hybrides” : elles conservent leur modèle d’abonnement mais proposent également une option de publication en libre accès, avec des frais par article parmi les plus élevés du secteur, par exemple 9500€ pour publier un article en OA dans Nature ou 8500€ pour Cell. Ces frais de publication prohibitifs vont à l’encontre des recommandations du Plan S qui demande de la transparence et des montants “justes et raisonnables” pour que les financeurs continuent à les prendre à leur charge.

Afin d’éviter des frais de publication trop élevés, d’autres revues, comme Science et The New England Journal of Medicine, permettront aux scientifiques financés par la cOAlition S de mettre en ligne leur manuscrit auteur accepté sur une archive ouverte (la version finale de l’article mise en page par l’éditeur restant accessible sur abonnement). Ces revues jouent donc le jeu de la cOAlition S et des auteurs en acceptant de mettre en place la nouvelle initiative du Plan S intitulée “Stratégie de Conservation des Droits” (SCD). Cependant, il n’est pas certain que cette voie pourra continuer à exister si un nombre important de financeurs rejoignent la cOAlition S.

Plus de 50 éditeurs (dont Elsevier, Springer Nature et Wiley) ont affirmé qu’ils n’étaient pas favorables à la SCD pour assurer la conformité avec le Plan S. Wiley et Springer Nature ont également déclaré qu’ils ne rejetteraient pas automatiquement les manuscrits dont les auteurs utilisent la SCD mais qu’ils les orienteraient vers la publication de l’article final en OA.

Dans son article, Holly Else reconnaît finalement que, malgré ses aspects complexes pour les auteurs, le Plan S a déjà entraîné un profond changement dans le paysage de l’Open Access :

  • toutes les revues sont désormais obligées de proposer une option de publication en Open Access ;
  • les prix pratiqués par les éditeurs devraient devenir plus transparents et refléter les services fournis.

Finalement, l’impact du Plan S pourrait dépendre du soutien des financeurs mondiaux, notamment américains et chinois.

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