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La bibliodiversité

Le terme “bibliodiversité” a fait son apparition dans le domaine scientifique, notamment depuis la publication de l’Appel de Jussieu pour la science ouverte et la bibliodiversité, en 2017. Ce terme, inspiré de la notion de biodiversité, fait référence à la pluralité des acteurs de l’édition et à l’invention de modèles d’édition innovants.

L’appel de Jussieu, signé par de nombreuses institutions de recherche, souhaite voir la communauté scientifique reprendre le contrôle du système éditorial, afin de développer un écosystème de la publication scientifique basé sur les principes de l’accès ouvert, de l’intégrité scientifique et de la transparence des coûts financiers :

“L’accès ouvert doit s’accompagner d’un soutien à la diversité des acteurs de la publication scientifique – la bibliodiversité – qui mette fin à la domination par un petit nombre d’entre eux dictant de ce fait leurs conditions aux communautés scientifiques. […]. Notre but est donc d’élaborer et de mettre en œuvre des modèles alternatifs adaptés aux objectifs de la science ouverte en affirmant la nécessité de soutenir l’innovation pour une rénovation profonde des fonctions éditoriales.”

Le deuxième Plan national pour la science ouverte, publié en juillet 2021, propose plusieurs mesures afin de “construire la bibliodiversité” en soutenant notamment :

  • La diversification des modèles économiques permettant la transition de l’abonnement vers l’accès ouvert sans frais de publication,
  • Les modèles économiques d’édition en accès ouvert sans frais de publication, ni pour les auteurs, ni pour les lecteurs (modèle “diamant”),
  • Les innovations éditoriales : prépublications, évaluation ouverte par les pairs, articles exécutables (Jupyter notebooks), articles de données (data papers), overlay journals, etc.

Concrètement, voici quelques exemples d’innovations éditoriales et de bibliodiversité :

– Les « overlay journals » ou épi-revues sont des revues scientifiques, gratuites pour les lecteurs comme pour les auteurs, rassemblant des articles d’abord déposés en archive ouverte puis évalués par les pairs, toutes les versions restant accessibles sur l’archive ouverte. Ce processus nécessite l’articulation entre une archive ouverte et le comité éditorial d’une épi-revue. C’est le cas avec HAL et Episciences.

– Certaines revues se tournent vers l’Open Access en abandonnant de grands éditeurs pour être publiées selon des modèles alternatifs. Citons Les comptes rendus de l’Académie des Sciences publiés par Elsevier jusqu’en 2019 et qui se sont tournés vers le centre Mersenne, plateforme d’édition de revues académiques en accès ouvert sans frais de publication. La politique du centre Mersenne est « d’éviter toute privatisation de la recherche et tout profit indécent. »

– Une autre forme de bibliodiversité sont les plateformes de publications des financeurs de la recherche. On peut citer la dernière-née en mars 2021, Open Research Europe, plateforme de publication de la Commission européenne et de ses programmes de recherche H2020 et Horizon Europe. Elle permet aux chercheurs financés de se conformer à l’obligation de publier en accès ouvert sans frais de publication ; ces derniers sont transparents et pris en charge par la Commission. De plus, le processus de peer-reviewing est ouvert.

Finalement, si l’on souhaite donner toutes ses chances à la réappropriation de l’édition scientifique par la communauté scientifique et à l’accès ouvert aux publications, “les systèmes d’évaluation de la recherche doivent être profondément réformés et adaptés aux nouvelles pratiques de communication scientifique” comme le précise l’Appel de Jussieu.

Dans ce nouvel écosystème éditorial, les connaissances scientifiques sont envisagées comme un commun : les ressources sont partagées le plus largement possible et la gouvernance est assurée par les chercheurs eux-mêmes.

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