Édition scientifique à l'ère de l'Open Access

Le COVID-19 peut-il vraiment faire changer le monde de l’édition scientifique ?

Même si de nombreuses publications portant sur le covid-19 ont été rendues accessibles, Vincent Larivière, professeur à l’École de bibliothéconomie et des sciences de l’information de l’Université de Montréal, reste sceptique sur l’engagement des éditeurs envers l’Open Access. Dans un article publié le 13 février dernier, il fait remarquer que ces efforts d’ouverture restent globalement insuffisants et qu’ils seront probablement temporaires.

En effet, la recherche biomédicale étant de nature intrinsèquement interdisciplinaire, il ne suffit pas d’ouvrir les articles portant directement sur le coronavirus : il est nécessaire d’ouvrir également tous les articles auxquels ils font référence. Environ 14 000 articles ont été publiés sur le coronavirus depuis la fin des années 1960 et ils citent plus de 200 000 articles. Or, ceux-ci sont toujours en accès payant pour la plupart.

Par ailleurs, Vincent Larivière fait remarquer que d’autres maladies, telles que la grippe, mériteraient que l’on ouvre les publications. “Si ouvrir la recherche sur les coronavirus accélère la production de connaissances dans ces domaines, pourquoi — autres que pour des raisons mercantiles — ne pas ouvrir les résultats de recherche sur tous les problèmes de santé publique ?”

Dans son interview donnée à the MetaNews, Vincent Larivière résume sa vision de la situation : “La réponse a été rapide mais je pense qu’il s’agissait avant tout d’un exercice de relation publique de la part des maisons d’éditions. Elles ont vu là l’opportunité de gagner en capital sympathie mais si elles avaient vraiment à cœur le partage de la connaissance, elles ouvriraient l’accès à toutes les publications, sans attendre une autre crise.”

La crise du coronavirus met en lumière les limites du fonctionnement actuel du système de publication scientifique et la captation de l’information par les éditeurs scientifiques, notamment sur des problématiques de santé publique. La science ne peut se construire qu’en s’appuyant sur des résultats antérieurs. Malgré cela, les résultats de la recherche restent encore souvent inaccessibles, verrouillés par des paywalls que dénoncent les partisans de l’Open Access. Espérons que les initiatives, discussions et débats qui surgissent aujourd’hui ne resteront pas lettre morte.

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